lundi 17 septembre 2012

Suite et fin du tournoi


Peu après le match contre l’armée, on nous apprend que l’on joue deux jours plus tard sur un terrain annexe contre l’équipe B des Jungle Crows, ça fait 3 matchs en 4 jours c’est pas mal ! Moi qui avait dit à mes joueurs qu’ils auraient du temps libre je dois les re-rassembler ! 

Donc nous voilà mercredi matin à tous prendre le taxi pour aller à l’autre bout de la ville, je ne prévois pas de jouer pour reposer mes jambes qui n’avaient plus l’habitude de courir ! 

Là on arrive sur le terrain et c’est vraiment une plaisanterie : c’est un terrain militaire avec des poteaux de foot. Et depuis 18 ans que je fais du rugby je pense que c’est le pire terrain que j’ai jamais vu ! 

Commençons par le centre du terrain : c’est dur comme la pierre et sans herbe, c’est l’endroit du « pitch » de cricket, un endroit supposé sec pour lancer la balle, quand on s’éloigne l’herbe arrive mais elle est vite noyée par la bouillase, tellement qu’au niveau des 22 mètres cette fange retenait des mares d’eau… verte… Continuons, en arrivant dans l’en-but, surprise le terrain descend de 20 cm vers des herbes hautes qui arrivent mi-jambes…

Après cet examen et entretien avec le coach de l’autre équipe, on est d’accord pour refuser de jouer sur le terrain pour des raison d’abord de décence mais surtout de sécurité. Les membres de l’organisation insistent pour que l’on joue me disant un aparté que ce serait une formalité pour mon équipe de gagner. Ce n’est pas la victoire que je cherche là, c’est la sécurité de mes joueurs ! On décide de rédiger une lettre conjointe avec l’autre entraineur en cas où ils nous forceraient à jouer. Pendant ce temps les officiels attendent les encore plus officiels pour prendre une décision. Après 20 minutes les arbitres britanniques et les officiels de l’IRFU apparaissent sur le terrain. Les arbitres avec lesquels j’ai sympathisé sont mort de rire à la vue du terrain et me font des faces qui vont dans le sens de ma décision, après discussion, nous n’avons pas à donner la lettre le match est reporté au vendredi matin 10h (la finale étant le samedi). Je profite quand même d’un terrain de cricket juste à côté qui était un peu plus décent pour faire courir mes joueurs.

La veille Jungle Crows qui nous a battu au premier match s’est qualifié pour la demi-finale.

Donc nous voilà de retour le terrain « officiel » le vendredi matin, ils ont bâchés le milieu de terrain ce qui ne l’empêche pas d’être une vrai pataugeoire. Le reste du terrain est acceptable, le match va se jouer. 
Rapidement mes joueurs prennent l’ascendant prouvant qu’ils n’ont rien à faire dans ce tableau. A la mi-temps, on mène 26-0. C’est à ce moment que je décide de faire tourner mon effectif pour reposer mes cadres en prévision du match du lendemain… Et là c’est le drame : en indiquant à un de mes joueurs « vedette » qu’il sort au profit d’un autre qui n’a joué que 5 minutes depuis le début du tournoi il s’emporte, disant qu’il ne sortira pas, que je dois en sortir un autre, là je suis vraiment surpris mais au fond le personnage est dans son rôle, c’est un gars qui a beaucoup d’égo et qui ne se prend pas pour un moins que rien. Donc je le raisonne mais il ne veut rien entendre, c’est à ce moment que Dave prend la parole et dit que c’est inacceptable, que je suis le coach et que l’on doit respecter mes choix. La l’indien dit qu’à cause de mes choix on a perdu le premier match (ça fait mal), et il dit ensuite « ok je sors mais je suis blessé pour le prochain match !». C’est dur d’enchainer là-dessus, je fais mon autre changement et laisse l’équipe. Je m’en vais directement parler avec ce gars pour lui demander ce qu’il lui prend, c’est une vrai tête de mule, il ne veut rien entendre.

La seconde mi-temps est anecdotique, les jeunes d’en-face étant fatigués, on déroule et on finit par 

s’imposer 57-0 plus gros scores du tournoi.

Pour le discours d’après match, je félicite les joueurs pour leur sérieux et les gars qui sont rentré pour leur niveau, j’ajoute que le comportement de la mi-temps du centre est inacceptable, et qu’à moins qu’il ne s’excuse devant tout le monde à moi et au groupe il ne jouera pas le prochain match. Tu te demandes après cet épisode à quoi tu as servi pendant un an avec tes valeurs du rugby, cet épisode en lui-même allait contre tout ce que j’essaye d’amener…

Bref, on est en finale de la consolante contre l’équipe de la police de Bombay qui est une équipe physique qui a un jeu stéréotypé autour de son 10 qui fait jouer ses avants.

Jungle Crows s’est fait battre par l’Armée Rouge la veille 40-8 et fini 3ème du tournoi, Bombay Gymkhanna battant dans l’autre demi-finale la police de Calcutta 40-3 (les deux finalistes avaient bénéficié d’un BYE en quart et n’avaient donc pas joué depuis dimanche alors que les perdant avaient joué le mardi…

L’après-midi, une réunion non-officielle de l’IRFU est organisée permettant à qui le veut de venir et échanger avec eux, ce à quoi je prends part avec plaisir. Et dire que je n’ai pas arrêté de poser des questions lors de la réunion serait exagéré mais je me suis fait entendre. Enfin les réponses étaient toujours les même et tournait autour de l’aspect financier, à croire qu’il n’y a que l’argent dans la vie… Finalement j’ai fait mes adieux à l’IRFU et tous m’ont remercié pour mon travail effectué, deux club m’ont même demandé si j’accepterais une proposition de leur part, ce à quoi j’ai répondu à l’affirmative, indiquant que désormais je cherchais un salaire, donc il faudrait accompagner la mission par un emploi qui puisse me financer.

Le soir je vais au cocktail des coachs et capitaines, tout ça est bien policé, et avec Gautam on décolle après une heure de dialogues pas franchement francs du collier.

Samedi, c’est le jour de notre finale, le coup d’envoi est à 13h30, et comme toute finale, la journée est longue. On arrive sur le terrain à 12h20 et j’indique à mes joueurs que l’on sortira des vestiaires à 12h45, mes gars sont décontractés, c’est normal ça n’est pas la grande finale et ce n’est pas notre objectif primaire mais je sens qu’ils vont faire un bon match. Personnellement je joue, prêt pour mon dernier match avec le club. De son côté le rebel de la veille était venu me trouver dans ma chambre pour s’excuser, et s’est ensuite excusé auprès de l’équipe. 12h45 on sort, et c’est à ce moment-là qu’un orage éclate avec une pluie diluvienne et des éclairs partout. Lorsque je remplis la feuille de match avant de rejoindre mon groupe pour son premier tour de terrain on me dit que le match est en fait à 13h45… Cela mets tout mon planning à l’eau (jeu de mot de circonstance !), je signale à mes joueurs d’aller se mettre alors à l’abris ça ne sert à rien que l’on s’épuise trop tôt. Pendant cette attente dans les vestiaires, l’orage redouble et à 13h05 quand je commence à resserrer mes joueurs dans le vestiaire les officiels nous font appeler. Après 150 mètres sous la pluie qui ont suffit à nous tremper on retrouve les officiels au sec, ils nous signalent qu’en raison de l’orage et pour conserver le terrain pour la finale, ils annulent notre match… Je demande, si j’ai une chance de les faire changer d’avis mais visiblement non… C’est vraiment frustrant !

Je retourne aux vestiaires la mort dans l’âme annoncer ça au joueurs qui même si ils sont globalement déçu le prennent plutôt bien et s’en vont serrer les mains de nos adversaires du jours. On se rechange et on va commencer la 3ème mi-temps plus tôt donc !

La pluie arrête de tomber vers 14h30, la finale entre l’Armée Rouge (tenante du titre depuis 5 ans) et Bombay Gymkhanna se jouera à 15h30. 

Pendant le match on met un peu l’ambiance, Thomas un ami français de Delhi qui était venu juste pour nous voir en finale joue de sa trompette, Paul chambre les équipe et on boit des bières en même temps, ambiance rugby quoi !

Après un match à suspense et dans la boue, Bombay Gymkhanna fait tomber le champion 7-0. Ils ont la particularité d’avoir fait venir pour la compétition seulement deux joueurs néo-zélandais à qui ils ont payé les billets d’avions et qu’ils dédommage financièrement…

A la fin du match, un de mes joueurs amène à moi un membre de l’IRFU que je connais plus par mail que directement, ce dernier me demande quand je pars pour la France, quand je lui dit que je pars le 24, il me demande si je peux repousser le vol, ils voudraient que je prépare et entraine l’équipe nationale féminine indienne pour le Pune 7s qui est un gros tournoi qualificatif  à la coupe du monde de rugby à 7 à Moscou… C’est une surprise, mais une bonne surprise ! Je ne sais pas quoi dire sur le moment, je demande un peu de temps de réflexion, et il est vrai que c’est une super opportunité, pour mon parcours, je ne suis pas sûr que cela se reproduire encore. Donc après en avoir parlé autour de moi, c’est unanime et décidé j’accepte la proposition ! Je devrais donc quitter Delhi plus tôt (jeudi) pour Pune qui est une ville proche de Bombay pour un camp du 20 septembre au 5 octobre, le tournoi étant les 6 et 7 octobre, je rentrerai en Europe le 8 ou 9.

La soirée s’est déroulée comme une 3ème mi-temps, je garderai les détails pour moi, seulement le réveil à 6h le lendemain matin pour prendre le train a été dur !

Voilà mon aventure va se prolongé et je vais essayer de partager avec vous cette opportunité qui m’est donné, moi jeune français de 24 ans qui va coacher l’équipe nationale indienne de rugby, même si c’est relatif, c’est quand même génial, je me demande si je vais pouvoir faire quelque chose d’intéressant ! 

Vous pouvez aussi suivre le projet sur Facebook sur Pierre à l'édifice ou sur Twitter @PierrealEdifice.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire